Après deux rééditions (Stomp 442 et Sound Of White Noise) et un live (Music Of Mass Destruction), on pouvait légitimement s'attendre à un nouvel album d'Anthrax. Et bien non, pas du tout, le groupe continue sa "suite commerciale" et fait un album de reprises... de lui-même! En effet, The Greater Of Two Evils présente quatorze morceaux de l'ère pré-John Bush chantés par l'actuel chanteur des Américains. Ces chansons ont été choisies par les fans directement sur le site officiel d'Anthrax; donc si vous n'êtes pas satisfaits des titres sélectionnés et que vous n'avez pas voté, vous ne pourrez pas venir pleurnicher...
Mais il n'y aura à priori aucune raison de se plaindre du tracklisting car les imparables sont bel et bien là: Caught In A Mosh, Indians, Madhouse, I Am The Law et autres Metal Thrashing Mad. Alors sous quel angle est-ce qu'Anthrax a décidé de réinterpréter son propre héritage? Et bien sans prise de risques car à part le morceau Deathrider qui a subi un lifting intégral, les autres compositions se contentent de changements mineurs (Belly Of The Beast, Madhouse...) ou généralement d'une reproduction à l'identique. Ajoutez à cela une production garage un trop cheap peu aidée par le fait que le groupe ait mis en boîte l'intégralité de The Greater Of Two Evils en deux jours...
Pourtant, cet album ne manque absolument pas d'arguments. Car si Anthrax joue de manière fidèle à l'esprit des compositions originales, il n'en demeure pas moins que John Bush donne une énergie supplémentaire à des morceaux déjà solidement thrashy (A.I.R., Keep It In The Family, Be All End All). Les améliorations apportées aux titres issus de Fistful Of Metal sont très convaincantes et l'on en vient à regretter que John Bush n'ait pas été dans le line-up d'Anthrax depuis les tout débuts! Le reste du groupe n'est pas en reste notamment sur les soli bien plus carrés que les originaux (A.I.R. et Panic, entre autres). Depuis plus de quinze ans, Anthrax joue et rejoue toutes ces chansons sur scène et on sent bien que chaque musicien a rajouté çà et là au gré du temps ses petites touches personnelles, reproduites ici pour notre plus grand bonheur.
Globalement, les nouvelles versions font oublier les anciennes à quelques exceptions près comme Madhouse ou Among The Living. Sans est-ce dû à leur statut de morceaux cultes, intouchables. A contrario, des surprises comme Deathrider Be All End All ou Panic se révèlent excellentes et, à leur écoute, de nombreuses personnes vont soudainement aller réécouter les originales qui avaient presque sombré dans l'oubli. De l'aveu même du groupe, The Greater Of Two Evils a vu le jour car à leurs concerts les fans réclamaient systématiquement des réenregistrements avec John Bush. Un groupe qui écoute son public: c'est rare et beau mais ça n'est pas nécessairement un gage de réussite artistique. Le manque d'ambition affichée sur The Greater Of Two Evils l'empêchera de toucher un public large comme ce fut la cas pour le très bon We've Come For You All.